Entretien avec Romain Garçon, animateur de projet pour les Compagnons du Tour de France

Pour élargir les perspectives à l’avenir des métiers de la rénovation et de la construction, Le Service Info Énergie – Pros de la Réno a souhaité rencontrer une structure qui participe à la formation des futur.es professionnel.les.
Entretien avec Romain Garçon, animateur de projet régional pour les Compagnons du Tour de France qui proposent notamment des formations dans les métiers du bâtiment.


Romain Garçon est animateur de projet régional pour les Compagnons du Tour de France. Son métier consiste aujourd’hui à chercher des financeurs, discuter avec des partenaires, et de façon plus large animer le réseau professionnel de la structure. Auparavant, il a enchaîné des emplois dans le domaine de l’artisanat, des travaux saisonniers.

Aujourd’hui, les Compagnons du Tour de France doivent répondre à une demande de la part des entreprises du secteur, qui se trouvent parfois en difficulté pour embaucher.

C’est en partie à la suite de ce constat que le projet Exception’elles a été initié en 2022. L’objectif ? Valoriser les métiers de l’artisanat auprès des femmes en mettant en avant la mixité, répondre à un besoin de main d’œuvre en provenance des entreprises… tout en restant en accord avec les valeurs portées par le réseau des compagnons (partage, entraide, émancipation).

Depuis le début du projet, trois actions concrètes ont été menées par la structure :

  • des portes ouvertes pour créer un temps d’accueil spécifiquement à destination du public féminin intéressé, sans frein d’âge de profil ou de projet
  • des immersions en atelier ou en entreprise
    Elles reprennent les notions introduites lors des portes ouvertes et permettent de valoriser la présence du public féminin déjà en formation
  • une sensibilisation des équipes en interne : l’idée est de proposer des séminaires avec des professionnelles, en proposant des ressources sur le sujet (sites, articles, témoignages, etc).
    L’un des enjeux, et pas des moindres, est d’arriver à informer des personnes en réflexion sur le sujet, et pas uniquement des habitué.es ou des convaincu.es.

Exception’elles, en chiffres

380 femmes reçues en événements sur les 18 portes ouvertes.
85 femmes en immersion en entreprise ou en atelier, puis 40 en formation.
Actuellement, les femmes formées sont entre 100 et 120 (sur 1000 apprentis), et représentent une proportion de 12 % au niveau régional, 8,2 % au niveau national sur le réseau des compagnons.

Quels sont les constats à tirer de ses actions pour l’avenir ?

D’après Romain Garçon, ils sont de plusieurs ordres. Tout d’abord, il semble compliqué (du moins à moyen terme) d’arriver à une situation de parité dans les entreprises, y compris sur les problématiques de parentalité. Ce dernier sujet nécessite du travail. « Dans certaines entreprises, il ne sera pas possible d’avoir les arrangements autour des horaires. Les patrons ne veulent pas porter la responsabilité de la vie personnelle des employés ».

Dans l’organisation des Compagnons, des rôles importants sont déjà tenus par des femmes, même s’ils sont liés à des aspects plus traditionnels (dames hôtesses et mères des compagnons). Des efforts assez conséquents sont par ailleurs faits par des petites entreprises pour améliorer les conditions de travail et d’hygiène des salarié.es et stagiaires.

L’autre constat est qu’il y a un fort « effet d’entonnoir » sur les actions menées jusqu’à là (d’après les chiffres des journées portes ouvertes pour Exception’elles), d’où l’importance de continuer à développer des évènements et de renforcer la communication sur les métiers de l’artisanat auprès des femmes.
Le projet a eu un impact mesurable sur les inscriptions des femmes dans les formations. Pour la suite, « un enjeu de cette envergure consisterait ainsi à faire appel à des actions d’une autre nature qui auraient pour objectif de sauvegarder cet engouement, de maintenir les femmes dans les formations, et ainsi consolider la place des femmes dans les métiers du BTP. »

Il semble tout aussi important d’agir à l’intérieur des entreprises (par des actions de d’information, de sensibilisation et des réflexions sur les améliorations possibles qui permettront de rendre le travail plus attractif pour des salarié.es moins habitué.es à ce secteur), qu’à l’extérieur, afin d’ouvrir ce secteur aux femmes qui ont plus de difficultés à envisager ce type de métier.

Les professionnels de l’orientation et de l’insertion professionnelle ont également un rôle clé à jouer pour être en mesure d’informer et de conseiller sur les métiers du secteur.
« Si le prescripteur ne connait pas les métiers du BTP, il ne peut pas informer ou orienter ». Une fois ce travail d’information sur le secteur du BTP effectué auprès de conseillers, ces derniers pourront donc élargir les propositions sur les choix professionnels proposés aux femmes.

Propos recueillis par Barbara Davidenko, conseillère Pros de la Réno – Décembre 2024

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